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Cabinet de Psychologie Samantha Rizzi

L’autisme chez les femmes : le secret des signes moins apparents

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L’autisme chez les femmes est un domaine relativement récent et encore peu étudié. Des auteurs comme Tony Attwood ou Sacha Baron-Cohen ont commencé à se pencher sur la thématique et toujours plus de jeunes filles ou femmes tout récemment diagnostiquées se mettent à en parler sur les réseaux sociaux. 

Les hommes sont beaucoup plus représentés dans les troubles du spectre de l’autisme (TSA) que les femmes. On dit qu’il y a une femme autiste pour 3 hommes.

Mais beaucoup de professionnels s’accordent à dire qu’en réalité le taux des femmes est sous-estimé.

Ceci s’explique par le fait que les outils de diagnostic pour les TSA sont élaborés pour les hommes. En effet, les tests recommandés pour le diagnostic portent tous sur des études auprès de la gente masculine.

De plus, les capacités d’adaptation remarquables des femmes autistes sans déficience intellectuelle jouent également leur rôle.

Dans cet article j’essaierai de vous livrer des informations pertinentes sur l’autisme au féminin

Définition

Qu’est-ce que l’autisme?

Les troubles du spectre de l’autisme (TSA) regroupent toutes les personnes ayant des difficultés cliniquement significatives dans les deux catégories suivantes :

  • les relations sociales, la communication verbale et non verbale 
  • intérêts et comportements restreints et répétitifs. 

La sévérité des symptômes peut varier de légère à sévère. Et la manifestation des symptômes dépend de chaque personne autiste. 

Si vous souhaitez en savoir davantage sur les critères diagnostiques de l’autisme, je vous invite à jeter un oeil à l’article dédié.

L’autiste avec un bon niveau intellectuel est appelé autiste de haut niveau. C’est l’ancien syndrome d’Asperger

L'autisme chez les femmes

Comme expliqué plus haut, les femmes ayant un trouble du spectre de l’autisme sont sous-diagnostiquées par rapport aux hommes. Ceci est d’autant plus vrai quand elles ne présentent pas de retard intellectuel.

On observe toujours plus de femmes qui obtiennent leur diagnostic à un âge déjà avancé par rapport aux hommes. Elles sont diagnostiquées par exemple à 16 ans, 30 ans ou même beaucoup plus tardivement.

Beaucoup d’entre elles reçoivent un diagnostic  différent ou même un faux diagnostic avant de pouvoir expliquer leurs difficultés par leur fonctionnement atypique. On dira d’elles qu’elles sont dépressives, névrosées ou même bipolaires. Et ce bien avant de poser le diagnostic d’un trouble du spectre de l’autisme.

En effet, l’anxiété sociale, les troubles alimentaires ou les troubles de l’humeur (comme la dépression) par exemple sont souvent mentionnés en rapport avec les difficultés de ces femmes. Ces troubles se rajoutent souvent au diagnostic des TSA.

Les femmes sont sous-diagnostiquées ou diagnostiquées tardivement parce que les critères sont basés sur les manifestations masculines. Chez les femmes ces caractéristiques se traduisent un peu différemment.

Mais qu’est-ce qui fait que les femmes autistes sont si différentes par rapport aux hommes? Qu’est-ce qui rend le diagnostic si difficile?

En fait il ne s’agit pas de différences au niveau des critères de diagnostic, mais plutôt au niveau de leur perception.

Les différences les plus marqueés sont regroupées en 4 catégories :

1. Les difficultés moins flagrantes au niveau des relations sociales

Les difficultés au niveau des relations sociales sont moins flagrantes : les filles avec un TSA  apprennent plus facilement les règles sociales par analyse et réflexion par rapport aux garçons. Leurs facultés d’imitation sont également meilleures.

Leurs compétences verbales sont plus développées et permettent donc de communiquer de façon plus efficiente. Elles parlent également davantage avec les mains que les hommes : leur gestuelle est plus présente.

Elle ont généralement un intérêt plus important pour les relations sociales. Toutefois beaucoup de femmes Asperger rapportent qu’elles auraient toujours eu plus de facilité à entretenir des relations amicales avec des garçons. Ceci pourrait s’expliquer par leur communication plus directe et moins implicite. 

En effet, les relations sociales sont fatigantes pour les personnes autistes. Ce qui fait qu’il leur est souvent difficile de passer du temps avec des amis sans être épuisé par la suite. 

2. Une meilleure compréhension de la Théorie de l'Esprit (Theory of Mind)

La « theory of mind » est le fait de se représenter les intentions, les pensées et les émotions d’autrui. C’est se mettre à la place de quelqu’un d’autre. 

Les personnes autistes ont beaucoup de mal avec le concept de mentalisation. Mais les femmes autistes sembleraient quant à elles paraître tout simplement plus égoïstes ou moins sensibles que les filles ou femmes ne présentant pas de TSA.

Ceci s’explique en partie par l’attente par rapport aux filles et femmes concernant les relations sociales. Les filles se doivent d’être plus sensibles et plus compréhensives que les garçons et les hommes. 

Ceci est donc plutôt un problème de genre en général.

3. Des intérêts et comportements moins atypiques et restreints

Les intérêts des filles et des femmes TSA sont davantage socialement acceptables. Ces intérêts peuvent être la lecture, la psychologie, les chevaux, le maquillage etc. Ces intérêts sont également plus variés.

Ces intérêts peuvent même parfois permettre de comprendre davantage la psychologie et les interactions entre les personnes. Ainsi, en regardant des films ou des séries, elles peuvent apprendre la manière de fonctionner des autres et les imiter pour mieux pouvoir s’adapter.

4. Des comportements moins visibles

Les filles TSA ont tendance à avoir moins de troubles du comportement. En fait ceci s’explique par le fait que les garçons extériorisent davantage leurs comportements alors que les filles les intériorisent. Un garçon va avoir des troubles oppositionnels alors qu’une fille sera davantage encline à présenter de l’anxiété ou des troubles de l’humeur. Il n’est donc pas surprenant que l’on remarque plus facilement des comportements liés au TSA chez les garçons.

En fait, les comportements des filles sont tout simplement moins visbles et peuvent passer inaperçus.

Jean-Philippe Piat et Adeline Lacroix ont bien illustrés les différences à partir du schéma suivant qui se trouve sur le site aspieconseil.com.

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Le camouflage (masking) des femmes autistes

Le masking ou le camouflage des filles et femmes autistes est une stratégie de compensation qui leur permet de s’adapter à l’environnement. Elles masquent en quelque sorte leurs difficultés dans les situations sociales de manière consciente ou non.

Ceci peut se traduire par le maintien du regard, par le fait de varier leurs expressions faciales et gestes dans le but de montrer de l’intérêt. Elles copient les expressions des autres ou exagèrent une émotion. De cette manière elles se rassurent que l’émotion va être perçue par les autres.

Les règles et les expressions sociales sont apprises par coeur et rejouées le moment opportun.

Il y en a même qui écrivent des scriptes entiers dans leur tête ou dans un cahier pour pouvoir affronter chaque situation sociale.

Une stratégie utilisée également est celle de poser des questions à leur interlocuteur. Ainsi elles s’évitent de devoir répondre à des questions elles-mêmes. Cela implique aussi qu’elles paraissent intéressées par ce que leur raconte la personne.

Il existe donc un fossé entre la personne qu’elles sont dans un contexte social par rapport à leur vécu interne.

Le camouflage est mis en place pour cacher les comportements autistes, paraître plus compétent au niveau social et paraître neurotypique (donc non autiste).

Le masking n’est pas seulement utilisé par les femmes. Les hommes le font également mais ils y arrivent généralement de façon moins bien et l’utilisent moins souvent.

Selon Tony Attwood (2007) les femmes arrivent à imiter des personnes non autistes en situation sociale. Ceci donne l’impression qu’elles sont à l’aise. Mais dès que l’on les place dans une situation nouvelle ou un environnement différent, elles commencent à perdre les pieds dans les échanges sociaux.

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Traduction d’un schéma de l’article : Putting on my best normal, Laura Hull, K. V. Petrides, Carrie Allison, Paula Smith, Simon Baron‑Cohen, Meng‑Chuan Lai3, William Mandy, 2017

L'importance de parler de l'autisme au féminin

Il est important de parler des femmes autistes pour assurer un meilleur repérage et une meilleure prise en charge.

Les conséquences de toujours cacher leurs traits et jouer un rôle en société peuvent être néfastes. Beaucoup de femmes autistes finissent par s’épuiser physiquement et mentalement. Leur stratégies d’adaptation leur demandent beaucoup de ressources qui leur demandent une concentration élevée à longueur de journée.

Il n’est donc pas surprenant qu’elles ont besoin de s’isoler pour récupérer et se ressourcer.

Une anxiété importante est souvent décrite également. En effet, face aux incertitudes du quotidien ainsi que la peur de ne pas paraître normale, elles finissent par développer une anxiété sociale et une anxiété de performance entre autres. (Si vous vous intéressez à ce thème je vous invite à consulter mon article sur Comment gérer l’anxiété.)

Les troubles de l’humeur comme la dépression ne sont pas rares non plus.

Un point important à relever est le fait que beaucoup d’entres elles ne savent pas vraiment qui elles sont, à force de vouloir paraître normale. Elles ressentent une véritable confusion concernant leur identité.

Conclusion

Il faut faire attention de ne pas tomber dans le piège de sur-diagnostiquer les femmes autistes. Chaque femme timide ou réservée n’est pas autiste.

Je relève encore une fois l’importance d’un diagnostic pour permettre la mise en place d’aménagements appropriés au travail ou à l’école. Il permet également d’informer les personnes autour et d’obtenir davantage de bienveillance face à ces dernières. De cette manière elles pourront regagner confiance en elles et se forger une identité propre.

Les recherches sur l’autisme au féminin en sont encore à leurs débuts. Mais les mentalités changent et les tests seront adaptées dans un futur proche.

En attendant restons ouverts et tolérants. Qu’on soit autistes ou non importe finalement peu dans le respect de chaque individu. Nous sommes tous différents et uniques à la fois.

N’hésitez pas à me contacter si vous avez des questions.

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